Lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF) et les mariages d’enfants : L’ONG « Voix de femmes » outille des journalistes et communicateurs.

Au Burkina Faso (BF), on estime le taux de prévalence des MGF (mutilations génitales féminines) à 75.8% chez les femmes âgées de 15 à 49 ans. Ce taux a peu évolué au cours des dernières années et le BF continue d’être classé comme étant un pays à « Prévalence modérément élevée ».

Les MGF sont pratiqués dans toutes les régions, tous les groupes ethniques et toutes les religions. Le taux de prévalence des MGF varie en fonction du lieu de résidence : touchant 68/7% des femmes (âgées de 15-49ans) dans les zones urbaines et 78.4% dans les zones rurales (ou réside la plus grande partie de la population). La capitale, Ouagadougou, comptabilise 14% de la population urbaine du pays et a un taux de prévalence de 64.8M chez les femmes âgées de 15-49ans. (28 TOOMANY ; let’s end it).

Malgré les multiples sensibilisations de part et d’autres, les sanctions, les emprisonnements, la pratique de l’excision a la carapace dure au pays des hommes intègres.

L’ONG « Voix de femmes » qui en fait son cheval de batail afin que les MGF soient totalement éradiqués au BF a, une fois de plus organisé une session de formation sur les MGF et les mariages d’enfants au profit d’une quarantaine de journalistes et de communicateurs (des médias en lignes, de la presse écrite, de la radio et de la télévision) venus des 13 régions du pays.

Cette session de formation qui s’est tenue du 22 au 24 juin 2023 à Manga (localité située à une centaine de kms de la capitale Ouagadougou (dans la région du Centre-Sud, chef-lieu de la province du Zoundwéogo) a permis à ces femmes et hommes de médias publics et privés de s’imprégner de la notion, de l’origine, des fondements, du cadre juridique des conséquences de cette pratique néfaste.

A l’issu des 72h d’échanges fructueux entre les journalistes et les communicateurs avertis de « Voix de femmes », le Directeur Exécutif de ladite ONG en la personne de Raphael Zonnaba

s’est prêté aux questions

Féminin Actu.

En plus de la communication sur les MGF, les acteurs de la presse se sont familiarisés avec la notion du mariage d’enfants (les causes, conséquences, cadre juridique…).

 Féminin Actu (F.A) : Pouvez-vous revenir sur le contexte de cet atelier ?

 Directeur Exécutif (D. E) : Cet atelier s’inscrit dans le cadre des activités que nous avons programmées ensemble avec le réseau des journalistes pour la promotion de l’abandon du mariage des enfants. Je dois rappeler que ce réseau a été mis en place en 2017 avec le concours du GALOP (groupe d’action de lobbying et de plaidoyer) qui était présidé par l’ex 1ère Dame Sika Kaboré et à l’époque nous avons fait un Plaidoyer avec les patrons des médias pour faciliter la publication des articles produits par les journalistes ; ce qui nous a emmené à élaborer  une feuille de route avec le réseau ; laquelle feuille de route nous a permis déjà de réaliser une caravane sur l’exclusion sociale des femmes accusées de sorcellerie,  une caravane sur le mariage des enfants.  L’année passée en 2022, nous avons organisé une session de formation des membres du réseau notamment les points focaux à Ziniaré et cette année, nous avons encore cette session qui vise à renforcer les capacités, les compétences des membres du réseau en matière de lutte contre le mariage des enfants en associant la thématique de l’excision.

 F. A : Quelles sont les thématiques qui ont été abordées ?

 D.E : C’est essentiellement le thème sur les MGF (mutilations génitales féminines qu’on appelle couramment l’excision). Il s’agit de faire en sorte que les journalistes sachent ce que c’est que l’excision, quels en sont les fondements, les conséquences, quelle est la politique gouvernementale, que disent les politiques en la matière, quelle est la législation qui est en vigueur au BF. Il  en est de même pour le mariage d’enfants sur lequel nous avons également échangé sur les fondements, l’ampleur du mariage des enfants au BF, quelle est la législation surtout que ce problème de mariage d’enfants reste un problème essentiel en matière de protection des Droits de l’enfant parce que le Burkina jusque-là reconnait le mariage des filles à 17ans et celui des garçons à 20 ans «  c’est vrai qu’il y’a eu beaucoup d’efforts au niveau des acteurs de la société civile pour demander à ce qu’on harmonise l’âge de mariage des enfants à 20ans. Cependant, c’est toujours bon que vous les communicateurs, les journalistes, que vous puissiez continuer à sensibiliser l’opinion publique, que vous puissiez continuer à produire les articles autour de la question afin de maintenir la pression, la mobilisation communautaire autour de ces problèmes puisque le BF s’est fixé l’horizon 2030 pour mettre fin à l’ensemble de ces pratiques c’est-à-dire les MGF et les mariages d’enfants.

F. A : Revenant sur la communication d’aujourd’hui, quelle est l’ampleur des MGF au BF et quelles sont les formes les plus répandues ?

D.E : Merci bien. Je crois qu’au niveau du Burkina, les formes les plus répandues sont essentiellement la forme ou l’excision de type 1 qui consiste essentiellement à enlever l’organe génital de la femme qui est le clitoris et le type 2 qui consiste à enlever non seulement le clitoris, mais également les petites lèvres. Ce sont ces deux pratiques, ces deux degrés qui sont les plus répandus ; cependant, il arrive qu’on trouve également des cas du 3ème degré c’est-à-dire qu’on a enlevé le clitoris, les petites et les grandes lèvres de la victime.

En terme d’ampleur, il faut dire que toutes les provinces sont pratiquement concernées par l’excision ainsi que toutes les ethnies « Il est vrai qu’il y’a certaines ethnies de façon marginale qui n’excisent pas, mais globalement, l’ensemble des ethnies est concerné par la pratique de l’excision. Les statistiques, les plus récentes que nous avons datent des enquêtes sectorielles, des enquêtes multisectorielles continues et des enquêtes démographiques de santé ; sur ces deux sources de données, on retient par exemple que sur les femmes de 15 à 49ans, la prévalence en terme d’excision au Burkina est de 67,3% c’est-à-dire que sur 100 femmes âgées de 15 à 49ans, il y’a environ 67 qui sont excisées). Lorsque nous regardons les plus jeunes notamment les 0-14ans, les données et enquêtes démographiques  de 2015 et les enquêtes multisectorielles continues donnent respectivement 13,3% et 11% ; ce qui veut dire qu’au niveau de la tranche la plus jeune, il y’a moins d’enfants qui sont excisés et cela s’explique : nous pouvons raisonnablement dire qu’il y’a quand-même une baisse sensible grâce à l’effort fourni par les acteurs notamment l’Etat, les partenaires techniques et financiers , mais également les acteurs de la société civile y compris beaucoup de leaders coutumiers et religieux qui sont aujourd’hui acquis à la cause de la lutte contre les MGF et des mariages d’enfants.

F.A : Vous parlez de baisse sensible. Cependant, ne craignez-vous pas que la pratique n’ait de l’ampleur avec le phénomène sécuritaire qui prévaut ?

D.E : Effectivement, vous savez que lorsqu’un pays se retrouve dans un contexte tel que nous le vivons aujourd’hui, il y’a beaucoup de craintes que certains indicateurs ne remontent « ce sont les MLGF, les mariages d’enfants, même le taux de malnutrition, de mortalité infantile, de mortalité prénatale.  De façon globale, sont des éléments qui peuvent effectivement, courir le risque d’être des indicateurs qui peuvent augmenter du fait qu’il y’a beaucoup de zones qui sont inaccessibles, des zones dans lesquelles les acteurs de la société civile n’ont pas accès pour continuer à sensibiliser la population ».

Il y’a aussi les attaques terroristes qui se conjuguent avec l’excision parce qu’on parle de la religion « c’est un peu l’extrémisme religieux : vous savez que beaucoup de gens expliquent ces pratiques par la religion et lorsqu’il y’a l’extrémisme religieux, il y’a beaucoup de crainte que les indicateurs ne remontent, mais attendons de voir si d’ici là il y’a de nouvelles enquêtes pour qu’on regarde quelle a été l’ampleur de l’insécurité sur ce phénomène ».

cette session de formation a été possible grâce à l’appui financier de l’UNFPA.

                                         benedicteoued@gmail.com

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